Être mystique c’est aimer le bien

Matthew Fox

Traduction Gilles Castelnau

Le mystique est un homme qui aime. Il s’aime lui-même, il aime Dieu, la Terre, l’existence, la vie, l’univers où vit la vie depuis 13,8 milliards d’étonnantes années. Il aime vivre, il aime se développer, il aime la beauté et les nouveutés que la nature et le Saint-Esprit offrent au quotidien.

Beaucoup de ces surprises sont, il est vrai, merveilleuses et saisissantes et c’est pourquoi on les appelle à juste titre des « miracles » (le sens fondamental du mot miracle est le merveilleux).

Un mystique est toujours curieux et ouvert et s’efforce de demeurer toujours « inspiré », de respirer tous les dons de la vie, à commencer par l’air que nous respirons.

Un mystique de tient rien pour définitivement acquis, même pas l’existence ou le monde matériel.

Un mystique se trouve amoureux au moins trois fois par jour.

Un mystique reconnaît qu’il est, et que les autres sont les objets d’une « bénédiction originelle ». Le mot « bénédiction » est l’équivalent théologique de « bien » : un mystique sait reconnaître le bien et a faim du bien.

Les vrais mystiques, ceux qui sont authentiquement mystiques, ont donc toujours les mots de « bien » et de « bénédiction » à la bouche et savent les reconnaître dans la vie courante.

Thomas d’Aquin parle de « bonté originelle », de « fraîcheur originelle ».

Hildegarde de Bingen parle de la « sagesse originelle » et dit qu’elle est comme une « petite tente dorée » qui se trouve à l’intérieur de chaque enfant à sa naissance, puis qui se dresse et prend sa place au cours de sa vie. Elle dépeint ce parcours en en soulignant les difficultés : rivières à traverser, montagnes à escalader, démons à affronter. Mais aussi de bons anges venant à notre aide.

Le poète et écrivain anglais T. S. Eliot a dit : « Les mystiques sont notre seul espoir. Sans eux c’est le désespoir. » Ils nous offrent en effet l’antidote au désespoir.

Car il y a beaucoup de désespoir dans l’air en ce moment. Le désespoir est une des raisons de la montée du fascisme, de l’extrême droite, de l’autoritarisme et de l’esprit complotiste. La réalité du changement climatique et le refus de nombreux responsables politiques d’en tenir compte est une source de désespoir pour de nombreux jeunes.

Ce n’est pas seulement en raison de l’attitude des médias qui présentent l’actualité de manière désespérée mais parce que le désespoir et le laisser aller sont des voies moins ardues que celle de la sagesse. Le désespoir entraîne du désespoir et il est bien plus facile de laisser le monde suivre son cours que de s’efforcer d’arranger les choses.

Saint Thomas d’Aquin avertit que le désespoir n’est certes pas le pire de tous les péchés – ce serait tout à fait injuste de le prétendre – mais qu’il en est « le plus dangereux ». En effet, un homme désespéré ne se préoccupe plus ni de lui-même ni des autres.

La guérison du désespoir que le mysticisme nous offre est de prendre conscience du plaisir que l’on éprouve dans la contemplation des merveilles et des beautés de l’immense univers comptant deux mille milliards de galaxies et toujours en expansion et le bonheur d’y vivre.

Le poète Rilke disait simplement : « L’existence est un miracle ».

La Via Positiva – http://protestantsdanslaville.org/gilles-castelnau-spiritualite/gc710.htm – reconnaît que cette remarque de Rilke est tout à fait vraie. Le rabbin Heschel disait lui aussi : « Le seul fait d’exister est une bénédiction, le seul fait de vivre est saint. »

Être invités à participer à l’immense mouvement de 13,8 milliards d’années que vit l’univers, à s’en émerveiller, à apprendre à le connaître mieux et y participer activement est une merveille, un miracle.

Le mystique observe le bien et repère ses manifestations. Le mystique est un chasseur-cueilleur du bien. Le mystique est celui qui aime le bien.

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